L’évaluation vue par… Alpabem

Alpabem (Association lavalloise de parents et amis pour le bien-être mental) a pour mission de soutenir les membres de l’entourage d’une personne qui présente des manifestations cliniques reliées à un trouble majeur de santé mentale, en leur offrant une gamme de services visant à les informer, les aider et les outiller en vue d’une meilleure qualité de vie. Nous avons échangé avec Patrice Machabée, son directeur, qui a partagé avec nous les fruits et les apprentissages tirés de la démarche d’évaluation menée avec l’appui du Centre de formation populaire (CFP).

Question (Q.) : Quelle est la mission de votre organisme ?

Patrice Machabée, directeur général (P.M.) : Notre organisme a pour mission d’améliorer la qualité de vie des familles qui ont un proche atteint de maladie mentale. Pour y arriver, nous avons mis en place une gamme de services dans le but d’outiller les familles, de les soutenir, de les informer. Par exemple, nous offrons des services de consultation individuelle, des groupes d’entraide, des programmes de formation, des conférences mensuelles, un magazine, un blogue etc. Finalement, nous tentons de rejoindre toute la famille et tout l’entourage d’une personne qui est atteinte d’une maladie mentale (parents, conjoint-e, amis, enfants).

Q. : Pour quelles raisons avez-vous démarré une démarche d’évaluation avec le CFP ?

P.M. : L’évaluation de nos services faisait partie de nos orientations : nous avions fait une planification stratégique en 2009-2010 et nous avions identifié la volonté d’évaluer l’impact de nos multiples interventions. Au départ, nous pensions travailler avec des chercheurs car certains de nos programmes ont été élaborés avec des partenaires universitaires. Puis, quand nous avons pris connaissance du programme EvalPop proposé par le CFP, on trouvait cela intéressant : la démarche Par et Pour correspondait à nos valeurs.  On trouvait très pertinent la possibilité de s’approprier nous-mêmes le processus d’évaluation. Notre démarche d’évaluation, en fin de compte, est une coïncidence entre une orientation bien établie et une proposition qui cadrait avec nos valeurs.

« Notre démarche d’évaluation, en fin de compte, est une coïncidence entre une orientation bien établie et une proposition qui cadrait avec nos valeurs », Patrice Machabée

Q. : Qu’avez-vous évalué et pour quelles raisons ?

P.M. : Nous avons porté notre attention sur le groupe d’entraide, premier service offert par Alpabem, il y a cela plus de 30 ans. Nous offrons des services de formation et des consultations individuelles pour lesquels les partenaires reconnaissent notre expertise. Aussi, nous voulions aller plus loin et évaluer ce service qui a été offert initialement par les familles qui ont créé notre organisation. Cela a été à la base de l’entraide qu’ils pouvaient faire. 30 ans plus tard, ce service est-il toujours pertinent ? Est-ce que ce service apporte un plus aux familles qui l’utilisent ? Plus généralement, notre organisme évolue dans le domaine de la santé et des services sociaux et certaines personnes ont des préjugés pas rapport aux organismes communautaires comme le nôtre et ceux-ci portent particulièrement sur les groupes d’entraide. Par conséquent, on trouvait opportun d’évaluer ce service et de rendre compte des résultats.

Q. : Comment s’est déroulé le processus ?

P.M. : Nous étions dans un contexte très favorable pour faire cet exercice. Tout d’abord, cela a été assez facile de convaincre et d’impliquer les administrateurs, les membres, les usagers puisque cette dimension participative fait déjà partie de notre culture d’organisation. Aussi, comme il s’agissait d’une orientation identifiée dans notre planification stratégique, notre conseil d’administration soutenait la démarche. Du côté des employés, l’exercice d’évaluation était également une proposition intéressante.  Annuellement, nous évaluons déjà nos programmes, mais davantage en terme quantitatif. Il y avait donc des évaluations faites, mais l’équipe désirait vraiment aller plus loin. Le principal défi a été le temps à investir dans la démarche, mais cela valait la peine !

Q. : Quels ont été les principaux résultats de cette démarche d’évaluation participative ? Les résultats vous ont-ils étonnés ou sont-ils venus confirmer les objectifs visés ?

P.M. : Effectivement, la démarche d’évaluation est venue confirmer ce que l’on savait déjà, à savoir que ce service de groupe d’entraide répond à un besoin et assure un soutien conséquent aux proches-aidants. Par contre, ce qui nous a surpris c’était la « rapidité des retombées », à savoir que les familles exprimaient les bénéfices de participer à ce groupe dès la première rencontre. Ce service a pour principal objectif de briser l’isolement des personnes participantes. Ce qui est ressorti, c’est que les personnes se sentaient déjà libérées d’un poids dès la première  rencontre et à compter de la deuxième, c’est 100 % des participants qui l’affirmaient. Cela était vraiment surprenant pour nous ! L’autre élément qui nous a interpellé, c’est qu’il y a des effets qu’on n’avait pas anticipés mais qu’on trouvait quand même intéressant. Par exemple, les gens pouvaient mieux dormir, on parle ici de bénéfices physiques et cela est vraiment très intéressant. Le dernier élément qui est venu confirmer que ce groupe d’appui a toute sa place dans nos services ce sont des témoignages comme ceux-ci : « J’ai réalisé que j’avais besoin d’aide pour être un meilleur aidant naturel ».

« Le dernier élément qui est venu confirmer que ce groupe d’appui a toute sa place dans nos services ce sont des témoignages comme ceux-ci : « J’ai réalisé que j’avais besoin d’aide pour être un meilleur aidant naturel ». », Patrice Machabée

Q. : Cette démarche vous-a-t-elle amené à réorienter la façon dont vous offrez ce service ?

P.M. : Il n’y a pas eu de modification majeure, mais surtout des bonifications. On a souhaité tenir compte de certains résultats comme par exemple, l’importance de l’accueil.  Par conséquent, on souhaite maintenant que ce soit les participants qui reçoivent les nouveaux dans le groupe d’entraide et pas juste le professionnel. Aussi, nous avons expérimenté en décembre dernier l’’organisation d’un atelier thématique. Le groupe ouvert n’est pas orienté sur un contenu précis et les gens viennent sans attente à ce niveau-là. Par contre, nous avons vu à travers certaines réponses que, de temps en temps, avoir un thème annoncé, cela peut être intéressant. Nous avons fait un premier essai avec une soirée thématique sur l’estime de soi et plus de 40 personnes sont venues. Il y a donc un intérêt pour ce type de soirée. Nous pensons le proposer une fois par trimestre.

Q. Parmi les outils du CFP, lesquels ont été les plus utiles ?

P.M. : Ce qui est vraiment très précieux dans la démarche proposée par le CFP, c’est sans aucun doute l’accompagnement proposé. Être accompagné, pouvoir échanger avec la formatrice, tester certaines idées, c’est très structurant. L’expertise de l’évaluateur était très utile pour certains « réenlignements ».

« Être accompagné, pouvoir échanger avec la formatrice, tester certaines idées, c’est très structurant », Patrice Machabée

Q. : Quelles ont été les retombées de cette démarche au sein de l’équipe ?

P.M.: Je dirai que cela a apporté une nouvelle bouffée d’air aux intervenants. Cela les a encouragé à aller encore plus loin dans leur propre programme. Les administrateurs ont été également très satisfaits des résultats et cela a accru la motivation et le désir d’implication. L’évaluation permet de mettre des mots sur le travail que l’on fait. C’est un peu comme un cadeau ou un prix qu’on reçoit ! Les résultats obtenus deviennent aussi un très bel outil de communication qu’on utilise dans différents évènements, tant auprès du grand public que des professionnels de la santé.

« L’évaluation permet de mettre des mots sur le travail que l’on fait. C’est un peu comme un cadeau ou un prix qu’on reçoit ! Les résultats obtenus deviennent aussi un très bel outil de communication qu’on utilise dans différents évènements, tant auprès du grand public que des professionnels de la santé », Patrice Machabée

Q. : Pour conclure, si vous aviez un conseil à donner à une organisation prête à se lancer dans l’aventure de l’évaluation ?

P.M. : Le conseil que je donnerai c’est l’implication de la direction générale. Il faut que le DG soit convaincu et soit le porteur de dossier pour que la démarche d’évaluation puisse être intégrée plus aisément dans la culture organisationnelle de l’organisme.

 

Crédits photos : Alpabem

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